Seascape Poetics, en français « Poétiques marines », conçue par Bettina Pérez Martínez avec l’assistance de Simone Cambridge, interroge la complexité des relations caribéennes avec l’eau. Pensée à l’origine pour être une exposition en présentiel sur le changement climatique et le tourisme éco-dommageable à Porto Rico, l’exposition virtuelle s’est développée pour inclure six artistes contemporain·e·s caribéen·ne·s - Lionel Cruet, Nadia Huggins, Deborah Jack, Olivia Mc Gilchrist, Jeffrey Merris, and Joiri Minaya – dont le travail dialoguent et s’arriment aux intersections des environnements construits et naturels, de la colonisation, du tourisme, du changement climatique et des identités caribéennes.
Ce projet est inspiré par les recherches de maîtrise de Pérez Martínez sur le changement climatique et la colonisation dans les arts visuels contemporains portoricains. Il a été profondément influencé par son expérience en tant qu'étudiante portoricaine vivant à Tiohtià:ke/Montréal lors du passage de l’ouragan María (2017) et par les idées abordées dans l’exposition novatrice Relational Undercurrents: Contemporary Art of the Caribbean Archipelago (2017) sur l’identité archipélagique commune dans les Caraïbes.Seascape Poetics s’appuie aussi sur le concept du poète barbadien Kamau Brathwaite de tidalectics, une vision dialogique des marées et des flux marins et une vue océanique du monde, dans lequel l’océan et la terre sont dans une relation continuelle, rythmée. Elle puise aussi dans les notions de poétique de la relation et du paysage du poète martiniquais Édouard Glissant, dans lequel la représentation en vers des Caraïbes capture les connexions complexes entre paysage, histoire, communauté et individu. À travers ces thèmes, l’exposition cherche à honorer la nuance et la diversité de chaque nation insulaire parallèlement aux connexions archipélagiques que nous partageons, grâce à une compréhension dialogique des flux de nos histoires, de nos identités et expériences.
À la lumière de la pandémie mondiale, Seascape Poetics a été réimaginée comme une exposition hybride virtuelle/en plein air, et lorsque la situation s'est aggravée au Canada et dans les Caraïbes, adaptée en une exposition en ligne. Bien que libéré des contraintes du commissariat physique, ce changement a amené le défi de développer un monde virtuel. C’est l’intersection entre le travail de Brathwaite et de Glissant, ainsi qu’un intérêt pour les espaces liminaires, qui a attiré Pérez Martínez vers l’imagerie et les tensions de l’océan et de son littoral. L’océan est inextricablement lié à l’esclavage, à la colonisation, aux ouragans et aux inondations ; à l’alimentation et aux moyens de subsistance ; à l’identité, la mémoire et la famille ; à la maison. Il évoque souvent de profonds sentiments de connexion à l’eau et aux marées, et un sentiment de perte ou de nostalgie quand on est au loin. Le littoral est un écotone, un lieu de rencontre entre deux communautés biologiques, et un espace de transition entre la mer et la terre. Il fournit un accès, à la fois symbolique et littéral, essentiel à la vie et à la subsistance des locaux, mais qui est contrôlé et restreint par la colonisation, l’exaction des ressources et le tourisme. Aujourd’hui, une grande partie du littoral des îles caribéennes est possédée par des sociétés privées, souvent des multinationales européennes ou nord-américaines, notamment des hôtels et des compagnies de croisières. Le monde virtuel de l’exposition, avec sa maison en bois, les roches de basalte, le littoral, l’océan et les arbres de la mangrove, a été inspiré par ces tensions, les préférences des artistes et les œuvres elles-mêmes.
En créant un paysage qui évoque la diversité des écosystèmes caribéens et occupé uniquement par des artistes caribéen·ne·s, Seascape Poetics s’engage dans la création d’un espace où les Caraïbes et sa diaspora existent temporairement dans un espace archipélagique partagé. Dans ce contexte, les œuvres parlent simultanément de la diversité des réalités vécues par les artistes et leur compréhension commune, grâce à l’émergence de poétiques marines qui incarnent les tensions liées à la mer de l’expérience caribéenne. Ces identités archipélagiques et ces histoires coloniales et linguistiques forment une connexion immergée qui attire les îles caribéennes les unes vers les autres, tout en les éloignant.
Cruet est né à San Juan à Porto Rico, et il travaille à New York et San Juan. Cruet a obtenu un baccalauréat en arts de La Escuela de Artes Plásticas, une maîtrise en arts du City College of New York, et une maîtrise en éducation du College of Saint Rose. Il travaille aussi avec le New York City Department of Education ainsi que plusieurs organisations à but non lucratif qui promeuvent les arts et l’éducation artistique pour la jeunesse immigrée.
Cruet utilise des techniques multiples, qui incluent des processus expérimentaux d’impression digitale, la performance et les installations audiovisuelles afin de réfléchir aux problématiques concernant l’écologie, la géopolitique et la technologie. Les œuvres de Cruet ont été présentées dans des expositions au Bronx Museum of the Arts (2017); au Everson Museum of Art à Syracuse (2017); au Museo de Arte Contemporáneo de Puerto Rico (2013); et à la Universidad de Sagrado Corazón, à Puerto Rico (2014); et dans une exposition solo au Bronx River Art Center (2015). En 2020, une exposition solo intitulée “Lionel Cruet: Dusk/Daybreak” a été présentée à la Yi Gallery à New York. En 2021, Lionel Cruet continuera ses recherches et ses projets artistiques lors d’une résidence au Centro de Arte Contemporaneo de Quito, en Équateur.
Huggins est née à Trinité-et-Tobago et a grandi à Saint-Vincent-et-les-Grenadines, où elle travaille aujourd’hui. Artiste autodidacte, elle est photographe, et depuis 2010 elle a constitué un corpus d’images caractérisé par son intérêt pour le quotidien. Son travail associe les pratiques documentaires et conceptuelles, explorant l’appartenance, l’identité et la mémoire à travers une approche contemporaine destinée à re-présenter les paysages caribéens et la mer.
Les photographies de Huggins ont été exposées dans des expositions collectives au Canada, aux États-Unis, à Trinité-et-Tobago, en Jamaïque, à la Barbade, en Éthiopie, en Guadeloupe, en France et en République dominicaine. En 2019, son exposition solo Human stories: Circa no future a eu lieu à la Now Gallery, à Londres, Royaume-United. Son travail se trouve dans les collections de la Wedge Collection (Toronto, Canada), la National Gallery of Jamaica (Kingston), et du Art Museum of the Americas (Washington, D.C., É-U). Nadia a été sélectionnée pour le New York Times Portfolio Review (2018) et son travail peut être vu dans plusieurs publications, notamment A to Z of Caribbean Art. Elle est co-fondatrice d’ARC Magazine et de l’initiative One Drop in the Ocean – qui vise à sensibiliser le public sur les déchets marins.
Jack est une artiste dont le travail est fondé sur l’installation audio/vidéo, la photographie, la peinture et le texte, les intersections de la mémoire culturelle et les changements climatiques. Son travail a pu être vu au TENT Rotterdam, au Perez Art Museum of Miami dans l’exposition The Other Side of Now: Foresight in Contemporary Caribbean Art qui a eu lieu en 2019-2020, et dans Relational Undercurrents: Contemporary Art of the Caribbean Archipelago, qui est présentée au Museum of Latin American Art à Los Angeles. Elle a exposé à la SITE Santa Fe Biennial, au Brooklyn Museum of Art, au Jersey City Museum, au Caribbean Cultural Center African Diaspora Institute, et au Delaware Art Museum. Ses résidences comprennent Lightwork, the Big Orbit Summer Residency. Son travail a été présenté dans le New York Times, dans Frieze, dans Art Burst Miami et dans Hyperallergic. À l’automne 2021, elle présentera une exposition survolant quinze ans à Pen & Brush à New York. Jack est actuellement professeure à la New Jersey City University.
Mc Gilchrist est une artiste multimédia et chercheuse blanche franco-jamaïcaine. Elle explore la manière dont les héritages coloniaux se déploient dans la technologie de la réalité virtuelle (RV). Elle a exposé au Canada, en Jamaïque, aux É-U, au Brésil, en Allemagne, en Norvège, en Autriche, en France, en Suisse et au Royaume-Uni. S’appuyant sur son expérience en tant qu’euro-caribéenne blanche et sur des recherches antérieures concernant la représentation de son identité hybride au sein de la culture contemporaine jamaïcaine, elle explore comment cela peut être représenté en RV. Son projet de doctorat individualisé en recherche-création emprunte des instruments analytiques aux études féministes, aux Black studies, et aux études caribéennes postcoloniales afin de proposer une structure pour l’expérience esthétique de l’immersion en RV, à la fois au sens propre comme au figuré.
Meris est un artiste né à Haïti en 1991 et élevé aux Bahamas. Meris a obtenu un diplôme d'associé en arts et artisanat du College of Bahamas, un baccalauréat en sculpture de la Temple University et une maîtrise en arts visuels de Columbia University en 2019. Meris a été deux fois Harry C. Moore Lyford Cay Foundation Scholar en 2012 et 2017, résident à la Guttenberg Arts A.I.R en 2016, et il est un ancien étudiant de la Skowhegan School of Painting and Sculpture 2019, entre autres. Meris a exposé et donné des conférences à New York, New Jersey, Philadelphie, Los Angeles, San Francisco, Vienne, Leipzig, Port-au-Prince et Nassau. Actuellement, Meris est résident au NXTHVN Studio pour l’année 2020.
Minaya est une artiste multidisciplinaire dominicaine-étatsunienne basée à New York. Elle a étudié à la Escuela Nacional de Artes Visuales (DR), à la Chavón School of Design, et à la Parsons the New School for Design. Minaya a exposé à travers les Caraïbes, les É-U et à l’international. Elle a récemment reçu le prix Artadia New York et le prix Colonne Brown Art Prize de BRICS, et elle a obtenu des bourses des fondations de Nancy Graves, de Rema Hort Mann, et de la Joan Mitchell Foundation. Elle a aussi été récompensée dans deux biennales dominicaines (XXV Concurso León Jimenes; XXVII National Biennial), et elle a participé à des résidences à Skowhegan, à Smack Mellon, au Bronx Museum, à la Red Bull House of Art, au LES Printshop, au Socrates Sculpture Park, au centre Art Omi et au Vermont Studio Center.
Pérez Martínez est une commissaire, historienne de l’art et chercheuse portoricaine établie à Montréal, au Canada. Ses recherches portent sur l’identité caribéenne, les études décoloniales, la politique de l’écologie et le changement climatique. Elle est commissaire de Seascape Poetics., une exposition qui interroge les relations complexes avec l’eau et l’écologie dans les Caraïbes à travers l’œuvre d’artistes contemporain.e.s de la région. Ses derniers écrits examinent la relation coloniale de Porto Rico avec les États-Unis en tant qu’agent central de la crise sociale et économique grandissante du pays. Elle regarde comment cette relation coloniale contribue à l’exploitation de la nature. Elle est titulaire d’une maîtrise en histoire de l’art de l’Université Concordia, à Montréal, Québec et d’un baccalauréat en gravure et en histoire de l’art de la State University of New York, à Purchase, New York.
Cambridge est une chercheuse et commissaire née à Nassau, aux Bahamas. Ses recherches interrogent l’esclavage transatlantique, l’identité caribéenne, le postcolonialisme et la race dans la culture visuelle et les théories curatoriales. Elle détient un baccalauréat en histoire de l’art et en géographie urbaine. Elle a obtenu le All Bahamas Merit Award (The Bahamas Ministry of Education) en 2016, le Archie Malloch Award for Public Learning (McGill University) en 2018, et le Arts Undergraduate Research Award (McGill University) en 2019. Ses recherches ont été publiées par le Département d’histoire de l’art et de communication de l’Université McGill et le Journal of Black Canadian Studies. Simone est membre du Conseil consultatif de l’Institute for the Study of Canadian Slavery à l’université NSCAD, assistante de recherche et coordonnatrice des communications au Curating and Public Scholarship Lab de l’Université Concordia ainsi qu’assistante-commissaire de Seascape Poetics.
Vendredi 12 février, 12 h - 13 h 30 (EST)
Bettina Pérez Martínez (commissaire) et Simone Cambridge (assistante au commissariat) guideront les participants à travers l’exposition virtuelle sur Zoom. La visite permettra aux visiteurs de se familiariser avec la plateforme virtuelle et de poser des questions aux commissaires.
Cet événement aura lieu sur Zoom et sera diffusé en direct sur la page Facebook de 4th Space. Pour participer, veuillez in'événemediquer votre présence au lien suivant :
Vendredi 19 février, 12 h - 14 h (EST)
Les artistes de Seascape Poetics, Lionel Cruet, Jeffrey Meris et Joiri Minaya, discuteront de leur expériences, en tant que personnes vivant et travaillant dans la diaspora caribéenne. Animée par Natalia Viera-Salgado, commissaire portoricaine établie à New York, la discussion portera sur la tropicalisation des Caraïbes, des histoires de migration et de l’impact de la distance sur l’identité individuelle et communautaire.
Cet événement aura lieu sur Zoom et sera diffusé en direct sur la page Facebook de 4th Space. Pour participer, veuillez indiquer votre présence au lien suivant :
Vendredi 26 février, 19 h – 20 h 30 (EST)
Une projection virtuelle des œuvres vidéo de Seascape Poetics, Drawn by water: (Sea) drawings in [3] acts, Act One: Wait (Weight) on the Water (2018) de Deborah Jack, Virtual ISLANDs: Submersion and Hybrid Identity in Virtual Reality (2020-2021) et Labadee (2017) de Joris Minaya. Un questions/réponses avec les artistes et Bettina Pérez Martínez aura lieu après la projection virtuelle.
Cet événement aura lieu sur Zoom et sera diffusé en direct sur la page Facebook de 4th Space. Pour participer, veuillez indiquer votre présence au lien suivant :
Bettina Pérez Martínez
Simone Cambridge
Lionel Cruet
Nadia Huggins
Deborah Jack
Olivia Mc Gilchrist
Jeffrey Meris
Joiri Minaya
Simone Cambridge
Lionel Cruet
Deborah Jack
Olivia Mc Gilchrist
Jeffrey Meris
Joiri Minaya
Bettina Pérez Martínez
Natalia Viera Salgado
Simone Cambridge
Amanda Coulson
Elizabeth DeLoughrey
Deborah Jack
Nadia Huggins
Bettina Pérez Martínez
Lizabeth Paravisini-Gebert
Melissa Raymond
Marina Reyes Franco
René Sandín
Edrin Symonette
María Juliana Angarita Bohórquez (Consultant/Copy Editor)
Simone Cambridge (Curatorial Assistant/Communications Coordinator)
SJ Kerr-Lapsley (Consultant/Copy Editor)
Alexandra Nordstrom (Consultant)
Alex Robichaud (Exhibition Coordinator/Copy Editor)
Daphnée Yiannaki (Consultant/Copy Editor)
Jayá – Macha Colón y los Okapi
María Juliana Angarita Bohórquez
Colectivo Babilla
Bettina Pérez Martínez
Daphnée Yiannaki
Blank Canvas
Simone Cambridge
Alex Robichaud
Xavier León
Amanda Coulson
Tatiana Flores
Jodi Minnis
Marina Reyes Franco
Dr. Shelley Butler
Dr. Jennifer Carter
Dr. Heather Igloliorte
Dr. Alice Jim
Dr. Erica Lehrer
Douglas Moffat
Kari Valmestad
Anna Waclawek
“Seascape Poetics” a été développée à travers le programme de résidence curatoriale de Beyond Museum Walls et du Curating and Public Scholarship Lab (CaPSL).
Le projet est soutenu par la générosité du Conseil de recherches en sciences humaines, du Sustainability Action Fund de l’Université Concordia, ainsi que du Fonds de recherche du Québec - Société et culture.
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Vidéo numérique
6 minutes
Dans Drawn by water: (Sea) drawings in [3] acts, Act One: Wait(Weight) on the Water, Jack analyse les relations caribéennes à l’eau à travers le littoral des Caraïbes et des Pays-Bas. Cette série en trois parties aborde le souvenir douloureux et complexe de l’esclavage et de la colonisation, ainsi que le rôle de l’eau dans le changement climatique, particulièrement à travers la montée de la mer et l’augmentation des super-tempêtes. À travers l’usage de tons noirs et gris profonds, Jack conteste ce que l’historienne de l’art Krista Thompson appelle la tropicalization, ou la réduction coloniale et touristique des îles caribéennes à un ensemble homogène, uniforme en Technicolor. En présentant la convergence de deux écosystèmes, Drawn by Water offre un commentaire sur la relation entre terre et eau, sur les espaces des colonisés et des colons, et sur les connexions et les expériences immergées qui forment l’identité archipélagique caribéenne.